M (de Losey)
Vu d’aujourd’hui, le cinéma de Joseph Losey, décédé il y a quarante ans, a quelque chose d’insaisissable. Loin des tics de mise en scène et des genres de prédilection qui caractérisent bien des œuvres, celle de Losey semble hétéroclite et touche-à-tout, ce qui a pu condamner à un oubli injuste une part de sa filmographie d’envergure. Des années 1940 aux années 1980, il s’est essayé au drame psychologique, au fantastique, à la comédie, au film policier ou au film historique, avec une précision dans l’étude des caractères, une intensité émotionnelle et un sens de la mise en scène toujours renouvelés. Ami de Bertolt Brecht et anglais d’adoption après avoir été chassé des États-Unis par le maccarthysme, Losey a forgé avec patience et assurance sa vision du monde à travers une galerie de personnages disparates, mais ayant souvent en commun d’être traqués, stigmatisés ou isolés.
Un tueur d’enfants tente d’échapper à la police et à la pègre qui le traquent. M de Losey est un remake américain du chef-d’œuvre de Fritz Lang, M le maudit, dont il transpose la trame des événements à Los Angeles.
Joseph Losey
Né en 1909 dans le Wisconsin, Joseph Losey entame des études de médecine à Harvard avant de bifurquer vers le théâtre. La crise de 1929 le sensibilise aux questions sociales et il s’impose, dans les années 1930, comme un metteur en scène de théâtre engagé. Il se rend en Union soviétique où il rencontre Bertolt Brecht, avec lequel il travaillera par la suite. De retour aux États-Unis, il commence sa carrière de réalisateur tout en s’investissant dans le parti communiste, ce qui lui vaut d’être inquiété par les instances maccarthystes. Il est donc contraint de s’exiler au Royaume-Uni et réalise dès lors tous ses films en Europe. Dans les années 1960, il rencontre Harold Pinter, qui va scénariser trois grands jalons dans sa filmographie : The Servant, Accident et The Go-Between, qui obtient la Palme d’or au Festival de Cannes 1971.