ÉvénementLes choix cinéphiles de Gashrat
En plus de leur concert qui se tiendra à la Cinémathèque ce jeudi 25 janvier, le groupe Gashrat nous gratifie d'une carte blanche de deux films : The Last Waltz de Martin Scorsese et Welcome to the Dollhouse de Todd Solondz. La musicienne Kelly Hurcomb a bien voulu répondre à quelques questions sous cet angle de la cinéphilie.
Avant de parler des films choisis dans votre carte blanche, est-ce que vous pouvez nous dire quelques mots de votre rapport au cinéma?
Kelly Hurcomb: J'ai toujours été une grande cinéphile et j'ai dévoré une tonne de cinéma (probablement inapproprié) dès mon plus jeune âge. J'ai étudié le cinéma à l'université et j'ai commencé à faire des films avec mon compagnon en 2017. Notre dernier projet, un court métrage intitulé Messy Legend, a été présenté au festival de film Fantasia cet été et sera projeté à nouveau à Montréal dans les prochains mois. Nous travaillons actuellement sur un long métrage d'horreur corporelle intitulé Worm, entre autres.
Comment avez-vous choisi les deux films présentés, The Last Waltz de Martin Scorsese et Welcome to the Dollhouse de Todd Solondz?
KH: Je crois que Chelsea a proposé ces deux films dans notre groupe de discussion et qu'ils se sont imposés d'eux-mêmes. The Last Waltz, bien que je ne me sois jamais assise pour le regarder en entier, passait souvent en arrière-plan lors des fêtes organisées par nos amis pendant le lycée, car nous étions tous de grands (faute d'un meilleur terme) boomers fétichistes du rock à l'époque. Nous étions très portés sur le psychédélique, l'art et la culture rock and roll. Welcome To The Dollhouse a toujours été l'un de mes films préférés. Je pense qu'il reflète notre sens de l'humour collectif et qu'il est profondément et douloureusement pur, d'une manière qui résonne avec l'ensemble du groupe.
Le premier film est un mythique concert filmé de The Band, le second un film sur l'adolescence où le rapport à la musique est moins évident. Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur ce qui vous fascine dans ces deux films et sur leur contraste / mise en dialogue au sein de votre carte blanche?
KH: J'ai passé du temps à y réfléchir et je n'ai pu trouver que quelques paragraphes décousus sur la façon dont je pense que Gashrat partage une sorte de connexion psychédélique avec ces deux films. Est-ce que ça a du sens, est-ce que quelqu'un d'autre dans le groupe sera d'accord avec ça? Je n'en sais rien!
En ce qui concerne The Last Waltz, je pense que Gashrat, en tant que groupe, s'identifie à l'esprit anti-establishment et libre du rock and roll des années 1970. Excusez le côté profondément ringard de la chose, mais vous comprenez. C'est de l'auto-expression pure pour l'amour de l'auto-expression, de la musique qui ne peut être définie ou identifiée que par sa vibration et son énergie, par opposition à la forme, aux thèmes lyriques ou aux arrangements instrumentaux. Nous restons plus ou moins à l'écart des influences ou des pressions de l'industrie ou de la scène musicale. Nous jouons quand nous voulons jouer et nous ne jouons pas quand nous ne voulons pas. Nous n'entretenons pas d'élan et ne créons pas d'œuvres par peur de ne pas être pertinents. L'idée de ne pas s'ancrer dans la conscience du public ne nous dérange pas et n'a pas d'impact sur les décisions que nous prenons en tant que groupe.
Nous n'avons jamais été douées en auto-promotion, nous oublions toujours d'apporter du merchandising aux concerts, nous n'avons même pas notre premier album en entier sur notre propre Bandcamp (je vais bientôt arranger ça, je le jure!). Nous avons un album entier enregistré que nous n'avons pas encore sorti. Le ferons-nous un jour? Seulement si et quand nous en aurons envie. Malgré tout, les gens veulent toujours nous voir jouer et sont attirés par notre groupe et notre musique. L'excitation semble toujours être là, ce qui est évidemment très réconfortant et encourageant, mais pas assez pour nous faire faire ce que nous n'avons pas envie de faire, haha.
Peut-être que tout cela revient à dire que nous avons un sens de la mystique que l'on n'a pas souvent vu depuis l'aube de l'Internet, semblable aux artistes les plus énigmatiques des années 1970, dont beaucoup sont présentés dans The Last Waltz. Cette mystique n'est pas quelque chose que nous construisons ou que nous visons, elle est juste inhérente à notre façon de fonctionner - c'est particulièrement évident dans notre processus de création musicale (que nous avons souvent du mal à décrire au-delà de «nous nous réunissons et nous trouvons ce que nous voulons faire»).
En quoi chacun de ces deux films résonne avec votre pratique musicale? À quel âge les aviez-vous découverts et en quoi ont-ils été marquants?
KH: Pour moi, il est facile d'établir des parallèles entre le personnage de Dawn Wiener et Gashrat, au-delà même de Welcome to the Dollhouse. Dawn est un personnage qui apparaît dans des films tout au long de la carrière du réalisateur Todd Solondz, mais qui n'est jamais interprété par la même actrice. Bien qu'elle prenne des formes différentes dans chaque film, elle conserve son esprit pur. Elle est toujours distinctement Dawn Wiener, une vraie originale. J'ai l'impression que, quelle que soit l'activité artistique dans laquelle nous nous lançons en tant que groupe ou en tant qu'individus, quelle que soit la forme que prennent ces formes d'expression, l'esprit de Gashrat sera toujours présent. Parce que Gashrat n'est pas seulement un groupe, c'est un mode de vie.
J'ai vu Welcome to the Dollhouse assez jeune (peut-être à l'âge de 11 ou 12 ans) et j'ai été instantanément obsédée - c'était sombre et drôle d'une manière qui a absolument changé ma vie. Ce film a eu un impact énorme sur mon sens de l'humour et sur mes goûts en matière d'art et de cinéma. C'est un film incroyablement formateur, incroyablement important, immensément emblématique. J'ai hâte de regarder The Last Waltz dans son intégralité pour la première fois. J'ai le sentiment qu'il va frapper fort à ce stade de ma vie et de ma «carrière» artistique.
Ce concert marque les retrouvailles de votre groupe après plusieurs années. Qu'est-ce que vous évoque ce retour, et le fait de se produire à la Cinémathèque?
KH: Je suis vraiment enthousiaste à l'idée de jouer à nouveau avec Gashrat. Notre lien est si profond, si spécial et si fou, je suis heureuse qu'on nous ait offert cette opportunité de jouer à la Cinémathèque et de choisir des films à présenter en parallèle. En tant que passionnée de musique et de cinéma, c'est un peu le rêve. J'ai d'ailleurs rencontré Lou Reed à la Cinémathèque en 2010 lors de la présentation de son film Red Shirley, ça a été l'un des plus grands moments de ma vie. On est là en bonne compagnie. Les vibes seront impeccables.