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Wendy and Joyce : une collaboration inachevée
avril 2014

Wendy and Joyce – clip 5. Coll. Cinémathèque québécoise.

Le tournage de Wendy and Joyce commença en 1967, mais la mort soudaine de Wendy Michener en 1969 mit fin à toute possibilité de collaboration entre les deux amies. Cependant, Wieland travailla à nouveau brièvement sur le projet alors qu’elle remontait et terminait plusieurs autres films inachevés avec l’aide de sa nièce, la cinéaste Su Rynard, et grâce à une bourse du Conseil des arts de l’Ontario, au milieu des années 1980. A and B in Ontario, Birds at Sunrise (1972-1986) et Peggy’s Blue Skylight (1964) furent terminés à cette époque. Bien que, selon les notes de l’artiste, Wendy and Joyce figurait dans la liste des films à terminer, il resta inachevé. En regardant A and B in Ontario, où Hollis Frampton et Joyce Wieland jouent à cache-cache avec leurs caméras, on comprend mieux tout le potentiel que recèle le jeu de réciprocités de Wendy and Joyce : le côté ludique et irrévérencieux de la collaboration, l’amitié créative enregistrée par la caméra. Rayée et usée, la pellicule témoigne des efforts de manipulation et de montage de Wieland ; elle ajoute une dimension esthétique au projet en matérialisant la présence de la cinéaste, qui tenta de donner une forme préliminaire à ces éléments sonores et visuels autrement disparates.

Dans les archives de la Cinémathèque québécoise, le matériel désigné par « Wendy and Joyce » rassemble les bandes originales de pellicule 16 mm et un premier montage d’environ 2000 pieds ou 55 minutes. On trouve également des transferts vidéo des films amateurs de la famille de Wendy Michener, réalisés par plusieurs générations de 1938 à 1958 (étant donné que le père de Wendy était politicien et gouverneur général de 1967 à 1974, ces films amateurs incluent des événements internationaux de nature très publique). Enfin, il s’y trouve de nombreuses bandes sonores ¼ pouce décrites comme les interviews radio menées par Wendy Michener pour la CBC avec plusieurs cinéastes (dont Pier Pasolini et Satyajit Ray, entre autres).

La demande de subvention déposée au Conseil des arts de l’Ontario par Wieland en 1984 décrit certains passages du matériel tourné :

Wendy Michener était l’une des critiques de cinéma les plus respectées du Canada quand elle mourut en 1969, laissant derrière elle un mari et deux jeunes enfants. Elle était la fille du gouverneur général de l’époque, Roland Michener, et de son épouse, la toujours courtoise Mme Michener.

Wendy et moi étions amies et ce film porte sur nous. Nous étions deux jeunes femmes qui aimions faire de l’art, faire la cuisine, se faire des amis et faire des films.

Le matériel existant consiste en environ 2000 pieds de pellicule 16 mm inversible, tourné alternativement par Wendy et moi. Il comprend un épisode en hiver dans la résidence officielle des parents de Wendy (nous deux en train de faire du patin à glace sur une grande patinoire extérieure, Wendy et ses parents à l’intérieur et Wendy avec des photos de ses parents) ; nous deux en train de cuisiner et de manger ; des fragments d’un film que nous étions en train de coréaliser (un livre dans la neige, un chien, une voiture filmée depuis une fenêtre) ; moi qui me prépare pour une exposition à la Galerie d’art de Vancouver (je couds une courtepointe dans un train, j’époussette et je touche des peintures et des assemblages dans la galerie, je parle à des gens au vernissage) ; moi qui filme des parties de LA RAISON AVANT LA PASSION lors du voyage de retour en train ; et finalement, le mari et les enfants de Wendy, muets de douleur lors d’un petit-déjeuner après le décès prématuré de Wendy. Notre amitié grandit au fil de notre tournage.

Wendy Michener interviewe Joyce Wieland partie 1 de 2 (9 min 36 s)

Wendy Michener Interviewe Joyce Wieland partie 1 de 2 (Bande sonore ¼ pouce, Coll. Cinémathèque québécoise)

Wendy and Joyce – clip 5. Coll. Cinémathèque québécoise.

Une bande sonore tirée des fichiers « Wendy and Joyce », dans le fonds Wieland de l’Université York, consiste en un enregistrement audio de sept minutes d’un court extrait de Sedmikrásky [Les petites marguerites] (1966), le film expérimental de la cinéaste tchécoslovaque Věra Chytilová. Controversé, comique et follement avant-gardiste, ce film sur deux jeunes femmes espiègles nous éclaire sur les propres inspirations de Wieland, en particulier l’influence de la réalisatrice tchécoslovaque sur ses techniques de « collage », ses effets spéciaux et ses astuces de caméra. L’enregistrement original sur bobine ¼ pouce est une collection de sept minutes de fragments musicaux, de bribes de dialogues et d’effets sonores, intitulé « “Les petites marguerites”, tiré d’un disque optique, juin 1987/Vera Kitlova par Wendy et Joyce ». Il s’agit d’un film phare de la Nouvelle Vague tchèque, qui fut censuré à sa sortie et qui causa à son auteure une interdiction de travailler jusqu’en 1975.