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Bill’s Hat
avril 2014

Bill’s Hat est une performance de cinéma qui a été présentée deux fois en 1967, d’abord en août au festival torontois de films expérimentaux Cinethon, précisément au cinéma Cinecity situé sur la rue Yonge (qui avait commandé l’œuvre par le biais d’un prix de 1000 $), puis en novembre au Musée des beaux-arts de l’Ontario (AGO). Comme le raconte la biographe Jane Lind :

Bill’s hat (Joyce Wieland, 1967) Film inachevé de 47 minutes. Coll. Cinémathèque québécoise
« Ce film à l’univers idyllique n’était qu’une partie de la performance intitulée Bill’s Hat, qui comprenait un autel couvert d’une centaine de bougies et de pots de fleurs. Un oreiller en forme de cœur pendait du plafond. Une femme silencieuse était couchée sur un piano, avec le chapeau en question sur le ventre. En plus du film de 50 minutes projeté sur un écran, quatre diaporamas montraient simultanément des “centaines” de gens portant ce chapeau de fourrure, et plusieurs personnes du public tenaient des petits projecteurs portatifs qui projetaient des images sur le dos d’autres spectateurs. L’intensité visuelle de lumières stroboscopiques se jumelait à l’assourdissante prestation en direct de deux groupes de musique, le Kinetic Ensemble de Stu Broomer et The 25 th Hour, un groupe de rock dont faisait partie le neveu de Joyce, Keith Stewart. »
Jane Lind
Joyce Wieland: Artist on Fire (Toronto: James Lorimer and Company, 2001), 167.

Le communiqué de presse de l’AGO (voir plus bas) et l’interview avec Wieland réalisée par son amie, la journaliste Wendy Michener (tirée des archives de la Cinémathèque, voir plus bas), témoignent avec exactitude de la performance et du film en question : l’artiste y raconte comment elle filma et photographia des centaines de personnes portant son vieux chapeau en fourrure de raton laveur, dont Jackie Burroughs, Jack Bush, Jean Sutherland Boggs, Judy Lamarsh, A. Y. Jackson, Timothy Leary et Graeme Ferguson, dont le fils Munro incarne l’un des enfants du tableau idyllique qui ouvre le film.

Michener et Wieland parlent de Bill’s Hat

(Bande sonore ¼ pouce, Coll. Cinémathèque québécoise)

Brett Kashmere et Astria Suparak situent Bill’s Hat au sein de l’histoire canadienne du cinéma en direct, aussi appelé cinéma « élargi », selon l’expression inventée par Gene Youngblood en 1970. Ils font également le lien entre Bill’s Hat et Labyrinthe, l’événement multiécrans d’Expo 67.

« Malgré son histoire riche et variée, le cinéma en direct canadien est très peu étudié. Parmi ses pionniers, on compte l’artiste interdisciplinaire Joyce Wieland, qui conçut une performance en technique mixte en 1967 pour Cinethon, un festival torontois de films underground qui durait une fin de semaine. Commandé par Cinecity, la salle de cinéma accueillant l’événement, Bill’s Hat, avec son “inconfortable cacophonie”, ses lumières stroboscopiques, ses quatre diaporamas et son film de 50 minutes, “déformait les perceptions des spectateurs quasiment jusqu’à la douleur”. La même année, Labyrinthe, l’œuvre multiécrans de Roman Kroitor, Hugh O’Connor et Colin Low financée par le gouvernement, fut présentée à Expo 67 dans un pavillon fait sur mesure de cinq étages. Le collage son et lumière étourdissant de Wieland et les innovations aux dimensions épiques créées pour la célèbre exposition universelle de Montréal donnèrent donc naissance, à la fin des années 1960, au cinéma élargi canadien. »
Brett Kashmere et Astria Suparak
« In Pursuit of Northern Lights: Tracking Canada’s Live Cinema », consultable sur le site http://www.brettkashmere.com/livecinema.html

Le cinéma élargi de Wieland : Photographies de la performance à l’AGO Avec l’aimable autorisation et le copyright du Musée des beaux-arts de l’Ontario (AGO), Toronto Photographie : Dennis Robinson

Le cinéma élargi de Wieland : Photographies de la performance à l’AGO Avec l’aimable autorisation et le copyright du Musée des beaux-arts de l’Ontario (AGO), Toronto Photographie : Dennis Robinson

Comme l’explique Wieland dans le communiqué de presse de l’AGO, « le film dans son entier (et les diapositives) sont des portraits non artistiques de personnes qui font ce qu’elles veulent avec ce chapeau de fourrure, et qui ainsi jouent un rôle ou se tiennent simplement devant mon objectif. Ce n’est que de l’amour : ça ne peut donc pas faire de mal. » Dans son interview, qui propose un aperçu complexe des politiques et du lexique culturels des années 1960, elle observe que les sujets révèlent leur personnalité en coiffant le chapeau, qu’ils adoptent et incarnent un tout nouveau personnage ou qu’ils se contentent de poser le chapeau sur leur tête sans réagir.

Photographie de Joyce Wieland portant un chapeau de fourrure (portrait professionnel), s.d. Bibliothèque de l’Université York, Archives et collections spéciales Clara Thomas, fonds Joyce Wieland, ASC33281 Photographie : CHUMMY

Archives sur le film

Prospectus du Musée des beaux-arts de l’Ontario du 29 novembre 1967 sur les événements du « Wednesday Open Night ». Éléments mentionnés : Peinture sans titre (triptyque), 1966, John Meredith et Bill’s Hat, film de Joyce Wieland. Éléments mentionnés pour la semaine suivante : Isaac Abrahamsz. Massa de Frans Hals et Goldwin Smith at The Grange d’Elizabeth Wallace. Bibliothèque de l’Université York, Archives et collections spéciales Clara Thomas, fonds Avrom Isaacs, ASC33275. Avec l’aimable autorisation et le copyright du Musée des beaux-arts de l’Ontario (AGO), Toronto