Ce dossier thématique accompagne un livre retraçant l’histoire de l’art vidéo au Québec de 1972, année de fondation du centre d’artiste montréalais Véhicule Art, à 1992, année choisie un peu arbitrairement, mais qui correspond grosso modo à la période de l’art vidéo d’avant le numérique. 1992 est aussi l’année où PRIM obtint d’importantes subventions lui permettant de devenir un centre multimédiatique plutôt que seulement vidéographique. La vidéo commence alors sa véritable transformation : d’art vidéo, secteur de l’art revendiquant son autonomie relative, elle deviendra, dans les années 1990, art contemporain et moyen technique amalgamé à l’informatisation de la société. Notre dossier présente une sélection d’œuvres vidéographiques historiques provenant du fonds PRIM d’art vidéo choisies parce qu’elles représentent un courant, une esthétique ou une démarche significative alors que nous les considérons avec notre recul temporel.
Le fonds PRIM d’art vidéo
La Cinémathèque québécoise (CQ) faisait l’acquisition des archives audiovisuelles des Productions et réalisations indépendantes de Montréal (P.R.I.M.) durant l’été 2012. Ce fonds est constitué de 1165 éléments vidéographiques datant de 1971 à 2009, plus 109 éléments identifiés au centre d’artiste montréalais des années 1970, Véhicule Art. PRIM fut fondé le 13 août 1981 après bien des péripéties qui virent le secteur vidéo de Véhicule Art gagner de plus en plus d’autonomie à partir de 1976. C’est en 1974 qu’Andrée Duchaine est embauchée à Véhicule Art où elle est chargée de la documentation photographique et vidéographique des événements et performances que tient la galerie. Elle avait envisagé le développement d’un centre d’accès à la technologie vidéographique dès cette année-là et avait obtenu une subvention du Conseil des arts du Canada pour un premier projet en ce sens appelé Vidéo express. Mais elle quittera la galerie avant que ce projet voie le jour. Il faudra attendre la fin de 1976 pour que marshalore1 et Sean Hennessey fassent naître Vidéo véhicule. Ce programme de la galerie prendra de plus en plus d’importance, mais aussi son développement accompagne le déclin progressif de Véhicule Art. En 1979-1980, Vidéo véhicule est connu en tant que « Prime vidéo » une expression plutôt anglaise. Toujours est-il que la rupture est consommée dès l’été 1981 alors que PRIM s’installe dans ses premiers locaux du 10 rue Ontario Ouest, tandis que Véhicule Art vivra ses derniers moments jusqu’à sa fermeture définitive en 1982.
Le fonds vidéographique qu’a acquis la Cinémathèque québécoise relate cette histoire. Il témoigne, par les vidéos qu’il regroupe, du rôle qu’a joué PRIM en tant que centre d’accès et centre de production médiatique auprès des artistes intéressés par l’utilisation de la vidéo et des nouveaux médias. De plus, il couvre une période mal documentée de l’art vidéo au Québec dont les œuvres représentatives ne circuleraient plus guère si ce n’était de la plateforme Vithèque du Vidéographe qui donne accès à plusieurs d’entre elles. On trouve dans ce fonds des productions d’artistes québécois francophones et anglophones ainsi que des productions d’artistes étrangers qui étaient de passage à Montréal. Plus généralement, ce fonds témoigne de l’évolution des rapports entre vidéographie et pratiques artistiques, de l’art conceptuel et des performances aux œuvres expérimentales ou de fiction; il atteste aussi des rapports conflictuels et changeants de la vidéo avec le cinéma d’une part et avec la télévision d’autre part. Deux ou trois générations d’artistes sont présentes dans ce fonds faisant état des remises en question, évolutions et esthétiques que chacune portera comme le flambeau de son engagement artistique. Enfin, ce fonds rend compte de la constante hybridité de la vidéo toujours en dialogues avec d’autres disciplines : arts visuels, danse, performance, cinéma, théâtre, musique et informatique.
Ce projet, le livre et le présent dossier en ligne, a été rendu possible grâce à une subvention de publication du Conseil des arts et des lettres du Québec obtenue par Jean Gagnon. Il n’aurait pas été possible non plus sans l’appui soutenu de la Cinémathèque québécoise et de son Directeur général Marcel Jean, de sa Directrice de la préservation et du développement des collections, Marina Gallet et de son Directeur de la diffusion et de la programmation, Guillaume Lafleur. Je tiens ici à les remercier ainsi que les documentalistes de la Médiathèque Guy L. Coté, Julienne Boudreau, Sylvie Brouillette et David Fortin, qui m’ont accueilli et aidé au cours de mes recherches ; mes remerciements vont aussi à l’Archiviste des collections afférentes au cinéma, vidéo et nouveaux médias, Andrea Kutchembuck, et à la Responsable de l’accès et de la reproduction des collections, Catherine Gadbois-Laurendeau. La collaboration du Vidéographe, qui nous permet de diffuser les œuvres de marshalore et de Marc Paradis, est grandement appréciée.