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Trouble dans le patrimoine : droit de réponse
Par kimura byol lemoine
septembre 2023

Dans cette série de réemplois d’archives réalisée à partir des collections de la Cinémathèque québécoise et de Vidéo Femmes, j'ai travaillé à partir d’extraits d’images des années 1970-80. Préservée avec la qualité des photos de l'époque, cette création a pour objectif de montrer les dynamiques genrées présentes au sein de l'industrie du cinéma et de la vidéo à un moment clé de l'histoire du féminisme. Les codes couleurs évoquent le rouge vif pour les hommes (rappelant la cravate de Trump) et le rose pour les femmes (longtemps attribué au genre feminin).

Afin d’accompagner cette série de rémplois d'archives, des citations ont été rassemblées avec l'ambition de rendre visibles les tensions qui subsistaient entre le cinéma et la vidéo à travers les discours recueillis en particulier au sein des publications de la Cinémathèque québécoise dans les années 80. L’ensemble de ces discours sont notamment portés par le personnel de la Cinémathèque et les vidéastes de Vidéo Femmes et du GIV. Ces ressources sont ainsi de précieux témoignages d’une époque où la distinction entre les supports pouvait centraliser des expériences de marginalisation ; celles-ci étant traversées par des questions esthétiques, économiques, identitaires et de genre. Ce rejet exprimé par le milieu du cinéma et de la télévision aura un impact dans la sauvegarde et la transmission de cette mémoire.

« La vidéo est-elle le Sida du cinéma? Question folle évidemment. Qu’ont-ils donc en commun? Les deux épidémies font en même temps leurs ravages? Coïncidence. Les deux virus sont également acquis? Normal. Ils rendent l’organisme qui les accueille absolument fragile à tous ces microbes qui autrement seraient bénins? Puis après. On ne sait pas quelle potion magique inventer pour redonner au malade une apparence de santé? Tant mieux, ça peut laisser à tous les Diafoirus macluhaniens le temps d’ajuster leur médium. À défaut de cyclosporine audiovisuelle, utilisons le téléfilm. Sida, vidéo, mêmes symptômes, même fonction. Une société se remet en cause, une industrie aussi, un art, c’est moins sûr. »

Pierre Véronneau, « D’un syndrome à l’autre, Des professionnels ont la parole », dans « Ce glissement progressif vers la vidéo », Copie Zéro, no 26, octobre 1985, p. 7.

« La seule frustration que j’ai avec la vidéo, c’est le manque de reconnaissance, la résistance du milieu cinématographique face à la vidéo (pour preuve : comptez les salles équipées d’un grand écran vidéo). Nous, à Vidéo Femmes, nous avons une vision réaliste de la distribution avec notre réseau en circuit fermé. Au moins, je suis sûre que mes productions sont vues et utilisées; j’en ai la preuve chaque jour. Et puis il y a le Festival annuel des Filles des vues à Québec qui témoigne aussi de la vitalité des vidéastes ».

Nicole Giguère cité dans Martine Sauvageau, « Vidéo Femmes : "Les dames aux caméras" », dans « Ce glissement progressif vers la vidéo », Copie Zéro no 26, octobre 1985, p. 28.

« Sans vouloir évaluer les qualités formelles ou de contenu spécifique à chacun des supports et à leurs utilisations, permettons-nous de souhaiter et de réclamer de ces nouveaux procédés d’enregistrement, de conservation et de restitution de l’image animée, qu’ils parviennent rapidement à un degré d’excellence incontestable; qu’ils dépassent et nous fassent oublier cet antique support que l’on appelait jadis la pellicule acétate 16 et 35 mm. Sinon, ce n’est pas la peine…! »

Pierre Jutras, « En guise de présentation », dans « Ce glissement progressif vers la vidéo », Copie Zéro no 26, octobre 1985, p. 3.

« Si nos préoccupations féministes et notre volonté de faire avancer le débat sur toute la question des relations hommes-femmes restent le principal leitmotiv de nos différentes activités, l’effort de création et d’imagination que nous demande notre travail de production joue aussi pour beaucoup dans notre engagement à Vidéo Femmes. Une bande sonore, un cadrage et des mouvements de caméra, un montage audiovisuel, ça se fignole en vidéo comme en cinéma, et c’est vraiment à tort qu’on associe le vidéo à des productions ternes et statiques. Les possibilités techniques que nous offre ce médium ne rivalisent peut-être pas avec celles que nous offrirait le cinéma (et c’est encore drôle!), mais il ne nous en ouvre pas moins des champs d’exploration, de découverte et d’invention d’une infinie multiplicité ».

Nicole Giguère et Michèle Pérusse, « Vidéo Femmes », dans « Des cinéastes québécoises », Copie Zéro, no 6, avril 1980, p. 35.

« Moi je faisais partie d’un petit groupe dans les années 80, nous étions des jeunes qui faisions de la vidéo comme Luc Bourdon, François Girard, Bernard Hébert, Luc Courchesne, Robert Morin. Nous sommes tous partis faire toute sorte de choses; François Girard fait diverses choses entre des mises en scène à l’étranger ou à Toronto et des films qui ont un certain retentissement international, mais il n’est pas vraiment autour de nous; Luc Courchesne a mis ses efforts dans la création et le développement de la Société des arts technologiques (SAT). Alors la CQ, au fil du temps, s’est aliénés beaucoup de monde et des énergies qui auraient pu converger vers elle. On pourrait aussi dire la même chose des relations avec des mécènes comme René Malo ou Daniel Langlois qu’on n’a pas su amener à nous ou garder près de nous. Il y avait simplement un désintérêt et Pierre Véronneau me l’a confirmé : ils ne voulaient rien savoir de la vidéo par exemple. »

André Habib, « Entretien avec Jean Gagnon », dans « Cinémathèque québécoise, 50 ans après », Hors Champ, 2013, https://horschamp.qc.ca/article/entretien-avec-jean-gagnon.

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